6 novembre 2006

Lobbying Territorial et Marketing Stratégique

"Marketing territorial"... Vendre le territoire... Il s'agit en fait pour les décideurs territoriaux d'utiliser leurs directions de la communication pour une mission stratégique, qui est celle d'agir sur les processus decisionnels externes présentant un intérêt pour le territoire, aussi bien pour la séduction, le développement et le maintien des personnes (du capital social) que pour l'attraction des investissements directs étrangers (au territoire en question).

De la "comm" au marketing stratégique territorial


Le marketing territorial se veut une discipline héritée du monde de l’entreprise,où le territoire est vu comme un produit à vendre à des entreprises qui sont des clientes, et qui vont choisir dans une offre territoriale leur lieu futur d’implantation.

La première approche adoptée par une majorité des agences de développement est d’établir une collection d’images vantant son territoire, et considérant ses voisins uniquement comme des concurrents potentiels. La lutte entre les territoires serait faite, selon cette approche classique, uniquement autour des atouts économiques et productifs de la région considérée, avec des conséquences catastrophiques pour l’emploi lorsque la stratégie du dumping fiscal est choisie.

De nombreux retours d’expériences recueillis auprès des organismes de représentation de la France dans la Silicon Valley (Chambre Franco-américaine de Commerce de San Francisco, Mission économique, antenne de Agence Régionale de Développement) montrent que ces stratégies de communication sans concertation avec les territoires voisins est nuisible au rayonnement de la France. L’Allemagne ou à la Grande Bretagne, par exemple, savent beaucoup mieux mettre en ordre de bataille les représentants de leur région. En bref, les actions classiques de marketing territorial se neutralisent à l’étranger.

Mieux valoriser l'identité des régions
Qui peut aujourd’hui ignorer qu’un grand nombre de décisions d’implantations se fait selon une logique de « coup de cœur » ? Comment se fait-il alors que ce type de processus décisionnel échappe aux théories de l’attractivité territoriale ? On peut trouver un élément d’explication dans le fait que ces éléments subjectifs sont difficiles à modéliser, et que les développeurs préfèrent asseoir leur stratégie de marketing sur des éléments plus concrets et quantifiables.

Nous sommes dans la situation de l’homme qui cherche ses clés sous le lampadaire : ce n’est pas là qu’il les a perdues, mais c’est le seul endroit où il voit quelque chose. A l’image de cet homme perdu, nos territoires ont besoin de nouveaux éclairages pour rendre leur action plus efficace.

Pour y parvenir, il faut être certain que l’ensemble des acteurs de la région sont prêts à les accueillir, à les intégrer dans un réseau social. Il convient donc de développer des services d’accueil pour les dirigeants de ces entreprises, pour les salariés et pour leur famille, afin que l’implantation de toute entreprise soit durable. Les territoires ont une âme, et c’est bien cette capacité d’animation (étymologiquement parlant) qu’il faut démontrer aux acteurs économiques et humains que l’on souhaite attirer.

Fluidifier la gouvernance locale pour une stratégie de territoire-puissance
Lors d’une intervention sur le thème de la nécessité d’une démarche de lobbying de qualité pour construire une Europe-puissance, Olivier Védrine souligne l’absence de coordination en France entre les actions menées par des ONG à l’étranger et les services en charge du rayonnement du pays à l’international. Ce défaut nous caractérise par rapport à une culture anglo-saxonne plus à même de créer des synergies croisées au nom de l’intérêt national.

On peut aisément translater cette remarque au niveau territorial. Les collectivités territoriales savent très bien générer au niveau international des coopérations culturelles et humanitaires, créant ainsi des réseaux d’influence potentiels qui restent sous-exploités.
Il est donc nécessaire, au niveau territorial, de créer des relations durables et systématiques entre des autorités publiques, voire entre les services d’une même collectivité.

Exemple d'action d'influence
Dans le département du Val-de-Marne, c’est la mission qui a été assignée à la Délégation Internationale pour Relations Economiques et Culturelles du Territoire (DIRECT94), chargée notamment d’assurer le rayonnement à l’international du MACVAL, nouveau musée d’art contemporain, tout en assurant une mission de promotion du territoire économique.

Il est intéressant de retenir la stratégie adoptée par cette délégation pour que son action de promotion dépasse la simple communication institutionnelle. Le musée présente l’originalité, soulignée par la presse, d’être implanté dans une banlieue, pudiquement appelée « péri-urbaine ». La démarche a été la création d’un groupe de réflexion international sur le thème « l’outil culturel, levier du développement urbain », rassemblant 200 représentants de plus de 50 pays , venus débattre la veille de l’inauguration du musée, rapportant leurs retours d’expériences respectifs. Une veille spécifique sur ce thème a été mise en œuvre [1], ainsi qu’un blog dont les commentaires sont ouverts [2], outil de gestion de la communauté de pratique ainsi créée.
La création de ce think tank a donc permis la mise en liaison de la conservatrice en chef du musée avec ses pairs à l’international, débouchant notamment sur des échanges de collections, et des projets internationaux communs.

Lien: Article de Roger Nifle sur le marketing territorial

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